- L’auteur devant les ruines d’un ancien alambic.
BALADE, HISTOIRE, DÉCOUVERTE
L’ilet “ Alcide ” (enfin) baptisé l’ilet Alcipe !
L’îlet Alcipe, baptisé !
L’état civil fait foi : le fils de Marcelly Destang et de Marie Angèle Vidot, né le 14 décembre 1878, déclaré au service de l’état civil de Salazie le 23 décembre de la même année s’appelait bien “Alcipe Vincent“.
Mais pourquoi diable l’îlet qu’il cultiva dans les hauts de Bois de Nèfles et où il vécut durant plusieurs décennies a-t-il été appelé îlet alcide ?, Qu’importe ! La raison a fini par triompher.
Aux dernières heures de l’an de grâce 2020, LONF a réparé l’erreur. Fin d’un long combat mené par René Grimaud, arrière-petit-fils du dénommé Vincent Alcipe “ Ma grand-mère, Alexina Clain, était la première fille de Xavia Payet, la deuxième femme “d’Alcipe” précise René Grimaud, président de l’association Bois de Nèfles découverte, créée en 1999.
A travers cette association, montée avec plusieurs amis et descendants comme lui d’Alcipe, René Grimaud souhaite perpétuer l’histoire de son arrière-grand-père et de l’îlet.
Il y a vingt ans, avec l’aide financière du Conseil Régional, l’association Bois de Nèfles Découverte comptait 19 salariés et encadrants qui ont permis de réhabiliter des portions de sentier, d’en créer d’autres, avec l’appui de l’ONF.
“Mi cherche pa la gloire, mi cherche pa la fortune, mais juste la fierté de faire vivre l’histoire” explique René Grimaud, arrière-petit-fils d’Alcipe. De Mare-à-Martin, dans le cirque de Salazie où il a vu le jour, à Bois de Nèfles Saint-Paul où il vécut une grande partie de sa vie et mourut en juillet 1944.
Alcipe eut une vie bien remplie. Ainsi, du 1er juillet 1900 au 21 octobre 1902, il effectue son Service militaire à Madagascar, comme le mentionnent ses états de services militaires qui précisent : “Renvoyé dans ses foyers le 21 octobre 1902, se retire à Salazie…” ””
Selon René Grimaud, Alcipe aurait sillonné l’île durant quelques années, habitant tour à tour à Saint-André, Sainte-Marie, Saint-Benoît, la Possession… il se dit, mais la frontière entre la réalité et la légende est souvent mince, que dans tous les endroits où il a vécu, “lu navé in zenfan né, in zenfan mort…”
IL S’EST BATTU POUR QUE L’ENDROIT REPRENNE LE PATRONYME DE “ ALCIPE ”
Le 28 juin 1904, Alcipe convolait en justes noces à Salazie avec Marie Annéa Boyer. Plusieurs enfants naitront de cette union qui durera jusqu’au décès de son épouse, victime de la grippe espagnole au début des années 1920 …
Quand Alcipe a-t-il posé les pieds pour la première fois à l’ilet qui a pris son nom ? Pas de certitude, mais selon René Grimaud, sa première incursion daterait de 1911…
S’il s’est battu pour que l’endroit injustement dénommé “ Alcide ” reprenne le patronyme de “Alcipe”, René Grimaud n’entend pas jouer les révisionnistes pour autant et avoue volontiers, d’après ses recherches : “Selon les kozman gramoune “, le premier à avoir jeté son dévolu sur cet endroit était un vieux cafre, peut-être un descendant de “Noirs Marrons , qui cultivait un lopin de terre à l’îlet Cambour, niché dans le rempart, sur la rive gauche de la rivière des Galets…
A écouter le récit de René Grimaud, la vie de son arrière-grand-père n’aurait pas été un long fleuve tranquille et le bougre avait un fichu caractère et aurait eu toute sa place dans un western. Il avait, parait-il, la gâchette facile et réglait ses différends de manière expéditive. Sans doute un reste de son passage sous les drapeaux durant lequel il s’est familiarisé avec le maniement des armes. Cette facette peu flatteuse de sa personnalité explique peut-être les zones d’ombre de sa vie et le silence qu’ont gardé celles et ceux qui ont connu Alcipe, comme semble dire René Grimaud.
Toujours est-il qu’un beau jour, MAFOUTA premier habitant de l’Ïlet a disparu et personne ne l’a jamais revu. Comme pour épaissir davantage le mystère, certains racontent qu’Alcipe se serait débarrassé de MAFOUTA d’une balle de son fusil calibre 24 qui ne le quittait jamais. D’autres évoquent un coup de HACHE et le corps de MAFOUTA” jeté dan’ rempar”…
Quoi qu’il en soit, Alcipe, débarrassé de son rival n’était pas pour autant maître des lieux. Aux yeux de la loi, il était un occupant sans titre et l’administration des Eaux et Forêts ne plaisantait pas avec les squatters à l’époque.
Il se raconte qu’il a pu vivre là, avec la complicité objective d’un garde forestier qu’il connaissait bien depuis son service militaire à Madagascar. Et donc, Alcipe a installé son boucan, qui a changé plusieurs fois de place. Il y avait une petite source, qui existe toujours, bien cachée dans la végétation, une petite basse-cour avec quelques volailles et quelques cochons et même un bœuf qui devait, selon toute vraisemblance, servir de “bœuf panneau” ”” pour acheminer jusqu’à l’îlet les charges les plus lourdes.
Alcipe cultivait non loin de là, une parcelle plantée en géranium. En parcourant le sentier depuis le chemin des Cryptomérias, on retrouve quelques vestiges de fours à géranium, envahis par la végétation, que René Grimaud désigne par le nom de ceux qui exploitaient des parcelles : le four plateau Damour, le four Willmann, le four Grégoire.
Vestige alambic 1880 – 1960
S’il passait le plus clair de son temps sur l’îlet, Alcipe avait sa maison familiale à quelques heures de marche de là, dans le village Bél-Air, dans les Hauts de Bois-de-Nèfles. De temps à autre, sa seconde épouse, Xavia, avec laquelle il s’était marié en 1924, après le décès de sa première épouse, venait le rejoindre avec les enfants pour un jour ou deux. Et puis, le 8 juillet 1944, Alcipe est “descendu” à Bel-Air où il est décédé deux jours plus tard à l’âge de 66 ans.
Entre l’histoire réelle dont personne ne pourra jamais démêler les fils et la légende, il n’en reste pas moins qu’un certain Alcipe Vincent, a vécu dans cet ilet reculé des hauts de Bois de Nèfles Saint-Paul et a marqué de son empreinte indélébile cet endroit qui s’appelle désormais “L’îlet Alcipe“.
Bernard Labrosse, référent sentiers à la direction régionale de l’ONF de la Réunion et ses collègues ont eu l’insigne honneur, dans “les dernières heures de l’année 2020“, de réparer une erreur en implantant un panneau sur lequel on peut lire :
Panneau officiel et reconnu
“Cet ilet fut habité au début du 20ème siècle par Alcipe Vincent. il y cultiva le géranium pendant 35 ans.Son prénom Alcipe est attesté par son Acte de naissance, en 1878, dans le cirque de Salazie. Ce prénom, peu courant, s’est transformé en ALCIDE au fil du temps”.
Pour Alcipe et ses descendants, pour le combat mené par René Grimaud, son arrière-petit-fils, Merci !
Cher Internaute, nous avons consacré beaucoup de travail à la réhabilitation du site îlet Alcipe, qui a été mentionnant un certain temps alcide. Tout cela a été réalisé sur une base bénévole, et à présent, nous sollicitons votre soutien, découvrez-en plus sur la page “suivante“